Compte-rendu de la rencontre avec Rokhaya Diallo à l'UNIL le 30 mars 2020 - Rencontre co-organisée par le CEG et l’Association des étudiant·es afrodescendant·es de l’UNIL
Chronique du CEG : Les événements du CEG sont régulièrement recensés par les étudiant·es en études genre de l’UNIL.
Rokhaya Diallo, journaliste, écrivaine, militante antiraciste et féministe française, nous a honoré de sa présence dans une vidéoconférence exceptionnelle dans ce contexte très particulier qu’est la crise du coronavirus. En effet, c’est derrière son écran qu’elle a généreusement accepté de répondre à diverses questions de la part d’étudiantes de l’Université de Lausanne.
Cet échange online avait pour but de mettre en avant les luttes que défend Rokhaya Diallo dans ses ouvrages, mais aussi sur les réseaux sociaux et différents médias. La discussion a permis d’aborder différents sujets comme les manifestations du racisme en France, sa position en tant que féministe, mais aussi des questions plus personnelles qui concernent directement son parcours et sa place dans la société en tant que femme noire.
Avant d’être journaliste, Rokhaya a fait des études de droit, de commerce et de marketing. C’est en avançant dans ses études, qu’elle s’est rendue compte que les minorités étaient très peu présentes dans les hautes études, ce qui l’a menée à se questionner sur sa position de femme noire. De là débute sa lutte contre le racisme : elle crée notamment l’association « Les Indivisibles » qui a pour but de déconstruire les préjugés ethno-raciaux en utilisant de l’humour et de l’ironie. Ses projets ne s’arrêtent pas là, puisqu’elle co-anime le podcast « Kiff ta race » au côté de Grace Ly, dans lequel les deux femmes abordent des questions de race et de sexe. Rokhaya Diallo est très présente sur les réseaux sociaux, qui sont, selon elle, un réel coup de pouce, car ils permettent aux minorités de s’exprimer sur des problématiques qui jusqu’à maintenant ne trouvaient pas leur place dans les médias principaux. Néanmoins, cette exposition sur les réseaux lui vaut beaucoup de critiques, car il est vrai que la journaliste n’hésite pas à évoquer des sujets qui fâchent.
Notamment, dans son dernier ouvrage La France tu l’aimes ou tu la fermes (Textuel, 2019), l’écrivaine présente la notion de « racisme d’État ». Elle nous explique que le racisme en France est produit par l’État et bien qu’il soit condamné par la justice française, aucune mesure n’a été prise jusqu’à maintenant pour l’arrêter. Elle donne l’exemple de la police, qui selon les statistiques, contrôle 20 fois plus les jeunes hommes non-blancs. De là, elle élargit le champ, en abordant la vision des féministes sur le port du foulard. Rokhaya Diallo se considère comme une féministe pro-choix, c’est-à-dire qu’elle prône le libre choix des femmes. Ainsi, une femme qui décide de porter le voile ne peut être discriminée pour cela, car son corps lui appartient. Finalement, elle revient sur le concept de « racisme anti-blanc ». Rokhaya Diallo affirme que ce dernier n’existe pas. Elle explique que le racisme est le résultat d’un système historique et politique. Elle parle d’une idéologie de domination qui a été mise en place par l’État. Or les Blancs n’ont jamais en tant que Blancs été l’objet de théories raciales. Toutefois, elle insiste bien sur le fait que les Blancs peuvent subir des discriminations en tout genre, mais cela restera toujours au niveau individuel, tandis qu’un non-Blanc aura tendance à subir des discriminations de la part du système (comme le montrent les discriminations à l’embauche ou sur le marché du logement locatif).
Finalement, Rokhaya Diallo termine la discussion par un message qui encourage tout un chacun à visibiliser et défendre les individus qui se battent pour défendre leurs droits.
Azra Mujdzic, bachelor Unil