Dans le cadre de la Cérémonie d’ouverture des cours de la Faculté des SSP, le 19 septembre prochain, Felix Bühlmann, Professeur de sociologie à l’Institut des sciences sociales, présentera les résultats des recherches menées à l’UNIL sur les élites et leur influence sur les dynamiques d’inégalités sociales, les transformations politiques ou les rapports de pouvoir économique.
Une sociologie des élites
Felix Bühlmann s'intéresse aux questions de sociologie économique et de sociologie politique, qu'il aborde souvent par une approche biographique. « Je considère les carrières comme un outil heuristique pour observer les pratiques individuelles et les structures organisationnelles dans leurs interactions » nous explique-t-il. « Au cours de mes douze dernières années de recherche, j’applique de plus en plus cette approche à la sociologie des élites afin d’étudier le fonctionnement des élites économiques, politiques, académiques ou financières. »
Pendant longtemps, les élites en Suisse ont été considérées comme discrètes, silencieuses et sans contours. Entre-temps, la recherche sur les élites est devenue un prisme important pour explorer la dynamique des inégalités sociales et a connu un nouvel essor grâce à sa combinaison avec des questions de sociologie du patrimoine, du genre, de "race" ou de la famille.
La mondialisation des entreprises suisses et la financiarisation de l'économie ont fondamentalement bouleversé le fonctionnement des élites suisses, et les recherches montrent le profond changement structurel que les élites suisses ont connu au tournant du millénaire. « Lors de ma conférence, j’expliquerai pourquoi, par la suite, les élites suisses sont devenues plus "bruyantes" et plus "visibles" et quelles nouvelles fissures, également politiques, ont résulté de cette transformation, par exemple dans le monde de la finance » annonce Felix Bühlmann.
Néanmoins, contrairement aux classes moyennes qui sont au centre des grandes enquêtes par questionnaires, les élites sont considérées comme des populations "difficiles à atteindre" - il est coûteux, voire impossible de les faire participer à des enquêtes ou des entretiens.
Une base de données unique et collaborative sur les élites suisses à l’UNIL
Les données liées aux personnes occupant une position de pouvoir dans les sphères politique, économique, administrative et académique suisses doivent être collectées avec des méthodes spécifiques. « Dans ma présentation, je montrerai comment nous avons, pour répondre à ce défi, constitué une base de données historique unique à l'Observatoire des élites suisses et pourquoi nous n'anonymisons pas les données comme beaucoup de nos collègues en sciences sociales » annonce le Prof. Bühlmann. Cette base de données sur les élites suisses, qui contient plus de 30'000 entrées sur les élites depuis le début du 20ème siècle, constitue un apport essentiel pour les recherches intedisciplinaires menées par des chercheurs et chercheuses en science politique, histoire, sociologie, sciences du sport et management de différentes universités helvétiques et étrangères.
Une des forces de cette base de données réside dans le fait qu’elle évolue sans cesse. En effet, ces données sont en libre accès et peuvent être enrichie de nouvelles contributions. « Des centaines de collaborateurs et collaboratrices non-professionnel·les nous aident régulièrement dans notre travail » raconte Felix Bühlmann. « Toute personne intéressée peut aisément consulter les données, les configurer, les télécharger et les analyser scientifiquement. »
A l’heure actuelle, les chercheurs et chercheuses de l’Observatoire des élites suisses sont associés à quelque 70 scientifiques de plus de 15 pays pour mieux comprendre les élites de manière comparative. Mais comment se fait-il que les données de tous ces pays soient stockées dans un bunker à Dorigny ? « Je vous l’expliquerai le 19 septembre prochain, ainsi que pourquoi nous serons confrontés au gouffre d'un énorme trou noir à partir du 1er janvier 2025 » annonce Felix Bühlmann.