Trois présentations brillantes et complémentaires pour continuer ce cycle de rencontre sur l'impact environnemental du médicament organisé par la Plateforme Durabilité Santé
1) Une pollution sous-estimée. La Dr Nathalie Chèvre nous apprend que toutes les rivières du monde sont polluées par des médicaments, inclus les pays riches comme la Suisse. Dans le Leman, on compte près de 50 tonnes de médicaments parmi les médicaments recherchés. C’est 5x plus que la pollution par les pesticides.
2) Les concentrations de médicaments mesurées dans la STEP de Lausanne reflètent les modes de consommation presque en temps réel. Ces dernières années, certaines stations en Suisse se sont équipées pour renforcer les taux d’abattement des micropolluants, dont les médicaments. Cela a néanmoins un coût énergétique et économique important.
3) Le Prof. Francois Girardin décrit les trois sources principales d’émissions de médicaments dans la biosphère: les sources industrielles, agricoles et celles liées à la consommation humaine. La cinétique des médicaments dans les compartiments environnementaux suit une cinétique similaire à celle des médicaments dans le corps humain : absorption, distribution, métabolisme et élimination. Ainsi, la STEP joue un rôle similaire à celui du foie humain, la distribution dans les cours d’eau est semblable à la distribution par le sang, la clairance des reins s’apparente à la filtration par les sols, le plancton et les coraux.
4) Les molècules endobiotiques, comme la plupart des vaccins, se dégradent rapidement et ne posent donc à priori pas de problème. Les molècules xénobiotiques (étrangères au vivant) sont plus stables du fait qu’elles contiennent souvent des groupes fonctionnels halogénés qui augmentent leur demi-vie. Elles persistent donc dans l’environnement. L’impact environnemental est une pondération entre la quantité prescrite et excrétée de molécules d’un côté, et leur éco-toxicité de l’autre. Ce constat devrait encourager les soignants, médecins et pharmaciens à la réflexion sur l’intégration de l’aspect éco-toxicologique des médicaments dans leurs préscriptions et administrations.
5) Le Dr. Jérôme Berger nous explique qu’il n’existe pas en Suisse de données sur la quantité de médicaments non utilisés et jetés. On estime néanmoins que le phénomène est important. En cause: le sur-stock chez les particuliers, la sur-préscription, le manque d’adhésion aux traitements... Quand on connait l'impact carbone de la production pharmaceutique (voir séminaire du 28 février et les données du Shift Project), se pose la question: dans quel contexte pourrait-on réutiliser ces médicaments? Auprès de qui, sous quelles conditions, comment s’assurer de leur qualité et quels sont les médicaments qui valent la peine d'être remis en circulation ? Des initiatives à grande échelles existent déjà, à l'instar de l’ONG "GIVMED" (GR), de l’entreprise sociale "SIRUM" et d’une initiative étatique (US). Les gains financiers de la réutilisation se chiffreraient en million.
Pour continuer ces réflexions et prendre part aux discussions, rejoignez-nous lors de la dernière rencontre de ce cycle: