Le gonflement d’un ou plusieurs membres en raison d’un lymphœdème touche une femme opérée d’un cancer du sein sur cinq à la suite de l’intervention chirurgicale. Le CHUV propose deux nouvelles méthodes prometteuses pour traiter cette pathologie.
Le réseau lymphatique comprend des vaisseaux, des ganglions et des organes qui permettent de faire circuler et filtrer la lymphe – un liquide biologique issu du sang – à travers l’organisme. Le réseau lymphatique est essentiel pour le fonctionnement du système immunitaire et il protège notamment des infections en agissant comme un filtre.
Lorsque les vaisseaux lymphatiques sont obstrués ou abîmés, le liquide lymphatique s’accumule dans les tissus et leur qualité se modifie progressivement, ce qui peut induire un gonflement, une lourdeur, des douleurs ou des infections récurrentes au niveau du membre atteint. On parle alors de lymphœdème. A un stade avancé de la maladie, la mobilité du membre peut même être altérée. Ces symptômes impactent fortement la qualité de vie des patient-e-s.
Le lymphœdème peut apparaître spontanément ou plus souvent suite à une lésion traumatique (une intervention chirurgicale la plupart du temps), une infection grave ou après un traitement du cancer du sein, par exemple, qui aurait nécessité une ablation des ganglions ou d’une zone de passage de voies lymphatiques.
Des techniques de microchirurgie pour soulager les patient-e-s
Des traitements dits conservateurs, comme le drainage manuel lymphatique par des physiothérapeutes ou le port de bas de compression, soulagent les membres atteints sans traiter la cause de la maladie. Plusieurs traitements chirurgicaux sont aussi possibles à différents stades de la maladie afin de soulager les patient-e-s, en complément des traitements conservateurs.
Le Service de chirurgie plastique et de la main du CHUV est spécialisé dans la reconstruction lymphatique. Les anastomoses lymphoveineuses permettent notamment de suturer les vaisseaux lymphatiques directement à des petites veines pour favoriser l’évacuation de la lymphe des tissus. Des techniques de microchirurgie et supra-microchirurgie rendent même possible la suture de vaisseaux minuscules (jusqu’à 0,5 mm de diamètre).
Pour les stades plus avancés de la maladie, la transplantation ganglionnaire donne des résultats plus efficaces car les ganglions sont transplantés dans la zone lymphatique fragilisée et connectés – à l’aide d’un microscope – aux artères et aux veines du membre atteint afin d’être revascularisés. « Alimentés en sang, les ganglions agissent comme des éponges et évacuent la lymphe tout en produisant des facteurs de croissance vasculaires qui vont recréer un nouveau réseau lymphatique », précise le Pietro Di Summa, professeur associé de l'UNIL, médecin adjoint et chirurgien au Service de chirurgie plastique et de la main du CHUV. « Le prélèvement en laparoscopie des ganglions autour de l’estomac est une technique mini-invasive qui permet, grâce à une petite incision, de diminuer l’ouverture de l’abdomen ce qui diminue le risque de complication opératoire et favorise une récupération rapide », explique la Dre Emilie Uldry, médecin associée et chirurgienne au Service de chirurgie viscérale, privat-docent à l'UNIL.
Première mondiale : le CHUV teste un vaisseau lymphatique artificiel implantable
Le Service d’angiologie du CHUV, spécialisé dans la prise en charge des patient-e-s atteint-e-s d’affections des veines, des artères, des vaisseaux lymphatiques et de la microcirculation, mène actuellement l’étude clinique Lymphopilot pour évaluer la sécurité et la faisabilité d'un nouveau dispositif implantable pour soulager et traiter le lymphœdème. Cette étude a été menée sur des femmes qui présentaient un lymphœdème sur un bras suite à une chirurgie liée à un cancer du sein.
« Il s’agit d’un dispositif implanté sous la peau, une sorte de drain artificiel troué, qui travaille à la place du vaisseau lymphatique abîmé ou absent chez la personne et draine la lymphe grâce à une petite pompe automatique actionnée depuis l’extérieur, précise Lucia Mazzolai, professeure ordinaire de l'UNIL, cheffe du Département Cœur-Vaisseaux du CHUV. Ce dispositif médical implanté dans le bras, léger et indolore, soulage au quotidien les personnes atteintes de lymphœdème. »
L’étude a démarré en juin 2021 et terminera en octobre avec de très bons résultats préliminaires qui ont été présentés lors du congrès européen de médecine vasculaire à Milan mi-octobre. « Démontrer la sécurité du dispositif au travers de cette première étude clinique était la première étape à franchir. Nous pouvons maintenant démarrer l’étude qui permettra de valider l’efficacité du dispositif et l’appliquer à différents types de lymphœdèmes », se réjouit la Pre Mazzolai.