Dans le sillage des chiffres fédéraux, l’expérimentation animale UNIL-CHUV a augmenté de 4% en 2022. Une hausse légère due à l’utilisation accrue de poissons-zèbres, à l’essor de la recherche contre le cancer et surtout au rattrapage post-Covid. Le point avec Laure Seriot, directrice de l’Expérimentation animale UNIL-CHUV.
L’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV) a publié les chiffres 2022 relatifs à l’expérimentation animale. L’utilisation d’animaux dans la recherche à l’UNIL et au CHUV n’a augmenté que de 4% par rapport à l’année précédente. Une hausse légère essentiellement liée, selon la directrice de l’Expérimentation animale (DEA) UNIL et CHUV, à un rattrapage post-Covid. « On retrouve des chiffres relativement similaires à ceux de 2019 », commente Laure Seriot. Et dans les grandes lignes, « notre situation est cohérente avec ce qui se passe au niveau fédéral », à savoir une augmentation générale de 2%. Au total donc, 53’573 animaux ont été utilisés l’an passé pour des expériences UNIL-CHUV, dont 90% sont des souris. Seuls quelques gros animaux ont été utilisés (quatre porcs et trois lapins). L’utilisation des rats quant à elle est également en réduction, « elle a diminué de moitié depuis 2015 », constate la vétérinaire.
Comme dans le reste du pays, l’augmentation globale correspond à une forte hausse de l’utilisation des poissons-zèbres, un modèle d’expérimentation en pleine expansion. « Dans le cadre UNIL-CHUV, leur mobilisation a pratiquement été multipliée par 40 depuis 2021, constate la vétérinaire. Mais elle s’est aussi et surtout généralisée dans toute la Suisse, notamment au niveau des instituts privés. » Dans le cadre UNIL-CHUV, les 4% s’expliquent aussi en grande partie par la progression de la recherche sur le cancer, liée notamment à l’essor du Ludwig Cancer Research (Institut Ludwig pour la recherche sur le cancer, LICR). « Aujourd’hui la moitié de nos projets de recherche portent sur cette thématique, précise Laure Seriot, et 46% des animaux utilisés en 2022 l’ont été pour des recherches en oncologie. »
Changer la manière de compter
Tandis que l’OSAV constate, au niveau fédéral, une augmentation de près de 5% des expériences de degré 3, soit celles dites « plus contraignantes » pour l’animal, les chiffres pour l’UNIL-CHUV diminuent de 8,8% par rapport à l’année précédente, avec 4770 animaux utilisés pour ce type d’expériences. « On remarque cependant une augmentation des tests de degrés 0 et 2 », souligne la directrice.
Si les chiffres relatifs aux expériences de degré 3 restent malgré tout largement plus élevés qu’avant 2018, l’OSAV en précise la cause : un changement de directive, à l’issue duquel certaines expériences se sont vu attribuer un degré de gravité plus élevé qu’avant. « À l’UNIL on avait des chiffres relativement stables jusqu’en 2018, mais avec ce changement dans la manière de compter, on a vu une progression très forte de 2019 à 2021 », constate Laure Seriot.
Les 3R en pratique
En tant que membre fondatrice du Centre de compétence 3R, qui vise à Réduire, Remplacer et Raffiner l’expérimentation animale (3R) au niveau de la Confédération, l’UNIL s’engage très sérieusement dans la mise en œuvre de telles mesures. Outre la recherche et le développement de modèles alternatifs, tels que l’utilisation de poissons, d’invertébrés (drosophiles ou mouches des fruits, par exemple) ou encore d’organoïdes humains (structures 3D développées à partir de cellules humaines), nos scientifiques travaillent à réduire au maximum l’utilisation d’animaux. Désormais, « les chirurgiens et chirurgiennes ont par exemple recours à une plateforme de simulation pour se former, en remplacement de tissus animaux », détaille Laure Seriot. Quant aux animaux utilisés, « nous optimisons le nombre d’informations qu’ils peuvent nous fournir, notamment en suivant le même animal tout au long de sa vie ». Les conditions d’hébergement ont également évolué, de même que les pratiques quotidiennes. Surveillées par des gardiens et gardiennes d’animaux, les souris bénéficient aujourd’hui d’abris, de petits tunnels ou encore de frisures leur permettant de se construire un nid ; leur environnement s’est donc enrichi par rapport aux conditions précédentes. « Les scientifiques se forment aussi à une manipulation douce des animaux », explique Laure Seriot. En particulier, la Faculté de biologie et de médecine est en train de mettre en place un prix 3R qui sera remis pour la première fois en juin 2024, afin d’encourager et sensibiliser encore plus de scientifiques aux différents modèles à utiliser pour aborder les questions biomédicales.
Retrouvez plus d’informations sur les chiffres 2022 relatifs à l’expérimentation animale directement sur le site de la Faculté de biologie et de médecine de l’UNIL.