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Une étude publiée le 2 août 2023 dans «Cell» par une équipe de l’UNIL révèle que la manière dont l’ADN se replie sur lui-même influe directement sur le développement et le fonctionnement du système nerveux.
L’ADN s’apparente à un fil de laine qui, au cours du développement, s’entortille sur lui-même jusqu’à former un chromosome, une pelote. L’équipe de Maria Cristina Gambetta, professeure associée au Centre intégratif de génomique (CIG) de la Faculté de biologie et de médecine de l’UNIL, a découvert un nouveau type de replis spécifiquement dans les neurones. Appelé meta-loop, il correspond à des boucles qui se forment car deux régions spécifiques très lointaines sur le fil d’ADN – parfois aux deux extrémités d’un chromosome – entrent en contact.
«Les mammifères, notamment les souris et les humains, possèdent des architectures génétiques analogues mais en raison de la grande complexité de ces organismes, il n’a, à ce jour, jamais été possible de déterminer le rôle joué par ces structures», relate Maria Cristina Gambetta, directrice de l’étude publiée le 2 août dans Cell et réalisée en collaboration avec l’EPFL ainsi que les universités de Princeton et de Varsovie.
En utilisant un modèle plus simple – la mouche du vinaigre (Drosophila melanogaster) – l’équipe a pu démontrer que les meta-loops ont une fonction particulière: elles influencent la lecture de l’ADN durant le développement du système nerveux des mouches. En supprimant ces boucles génétiques, les chercheurs ont en effet observé un problème de connexion entre le cerveau et les muscles des insectes, qui se traduisait par des difficultés de coordination et des convulsions.
Retrouvailles entre partenaires génétiques
Ces meta-loops sont des structures très grandes, puisque certaines d’entre elles ont une longueur correspondant à environ un huitième du génome entier – du moins chez les mouches. Aucun mécanisme de repliement de l’ADN connu à ce jour ne peut expliquer leur formation mais les scientifiques de l’UNIL ont montré qu’au moins une partie d’entre elles se créent lorsque des protéines particulières se lient à l’ADN situés aux ancres (les deux régions éloignées sur le ruban d’ADN qui entrent en contact).
«L’aspect le plus remarquable et surprenant des meta-loops que nous avons découvertes est la spécificité avec laquelle l’ADN aux deux ancres interagit malgré les distances énormes qui les séparent sur le fil génétique», souligne la professeure. Son groupe de recherche étudie actuellement la manière dont ces attaches communiquent «à distance» pour être capables de se rejoindre lors du développement du système nerveux.
«Les meta-loops offrent un tout nouveau paradigme à explorer, une piste inédite pour aborder cet exercice difficile qu’est la compréhension de l’ADN. La pelote du fil génétique est loin d’être entièrement déroulée, et n’a pas fini de révéler tous ses secrets», conclut la chercheuse.