La plupart des gérants de placements immobiliers suisses disposent déjà d’objectifs clairs pour réduire les émissions de CO2 et atteindre l’objectif de zéro émission nette à l’horizon 2050. Il s’agit de l’une des principales conclusions d’une étude sur leur engagement en matière de critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) conduite par des chercheurs de la Faculté des HEC de l’Université de Lausanne en collaboration avec la BCV. Cette recherche constitue une première et sera reconduite chaque année.
Les chercheurs et chercheuses du Center for Risk Management (CRML) de la Faculté des HEC, Fabio Alessandrini, Eric Jondeau, Ghislaine Lang (précédemment à HEC Lausanne) et Evert Reins, se sont penché·e·s sur les trois principaux types de placements indirects (à distinguer de la détention directe de bâtiments) dans l’immobilier suisse: les fonds, les fondations et les sociétés immobilières. L’analyse a notamment porté sur l’intégration des objectifs de la transition énergétique pour une Suisse climatiquement neutre à l’horizon 2050. Réalisée une première fois en 2021, sur la base d’éléments concernant les exercices 2020, elle sera mise à jour annuellement.
Avec un volume d’actifs total de 174 milliards de francs, les investissements immobiliers indirects couverts par cette étude sont une catégorie de placements importante pour de nombreux investisseurs, en particulier les caisses de pension. Alors que l’immobilier est l'une des principales. sources d’émissions de CO2 en Suisse – environ un tiers du total – et recèle un potentiel de réduction important, la mise en oeuvre des critères ESG est moins étudiée dans ce domaine que dans d’autres types d’investissements. Ainsi, pour les investisseurs, cette analyse constitue une référence.
Pour cette enquête, 143 fonds, fondations et sociétés immobilières ont été contactés. Un total de 59, représentant 66 portefeuilles, ont répondu au questionnaire permettant la collecte d‘informations concernant plus de 500 points de données qualitatives et quantitatives relatives aux critères ESG. Le taux de participation est de 46%. En termes d'actifs sous gestion, l'enquête couvre environ 65% du marché, la plupart des grands gestionnaires de portefeuilles ayant participé. La couverture pour les fonds de placement cotés en bourse atteint 93%.
Réduction des émissions de CO2 en priorité
L’analyse des réponses montre d’abord que la plupart des répondants (75%) disposent déjà d’objectifs clairs pour réduire leurs émissions de CO2 et atteindre l’objectif de zéro émission nette.
Cela représente une réduction de 16% d’ici 2025, 40% d’ici 2030 et 96% d’ici 2050. Si les portefeuilles immobiliers étudiés affichent de bons résultats en matière de consommation d’énergie et d’émissions de CO2, ils sont moins bons dans d’autres domaines - notamment pour ce qui a trait à la production de déchets et à la consommation d'eau.
La dimension sociale offre également une marge d’amélioration au vu des résultats du rapport qui font état de faibles niveaux d’engagement envers la collectivité quant à des projets de développements immobiliers, en particulier de la part des sociétés immobilières.
Globalement, la plupart des entités précisent qu’elles ont mobilisé d’importantes ressources pourassurer la conformité ESG. Environ 50% d’entre elles annoncent l'engagement d’au moins unepersonne à plein temps, responsable de la gestion des questions ESG, et 70% indiquent avoir mis enplace un comité dédié ou une task force. 45% des répondants ont signé les Principes pour l’investissement responsable des Nations Unies (UN-PRI).
Une vue d’ensemble de la durabilité
Professeur à l’UNIL/HEC et co-directeur du CRML, Eric Jondeau, précise: «En établissant un benchmarkingde la performance ESG annuelle des portefeuilles d’investissement immobilier, les données peuvent être comparées et mises en exergue au fil du temps. Le rapport fournira une indication précieuse des tendances quant aux performances de ces entités d’investissement, au travers des différentesdimensions des critères ESG pour les actifs qu’ils détiennent dans l’immobilier suisse».
Fabio Alessandrini, professeur à l’UNIL/HEC et co-directeur du CRML, ajoute: «Le rapport a pour objectifde donner une vue d’ensemble de la durabilité. Si les questions environnementales apparaissent comme le point-clé, une évaluation exhaustive et plus pertinente des besoins de durabilité doit intégrer les politiques sociales et de gouvernance dans un seul cadre.»
Fabio Simoncini, gestionnaire de portefeuilles immobiliers à l’Asset Management de la BCV relève:«Ces résultats sont utiles pour mieux prendre en compte les critères ESG dans la gestion de portefeuilles investis dans l’immobilier suisse. Il s’agit d’un premier état des lieux objectif de leur intégration dans cette classe d'actifs, qui manque encore de mesures standardisées dans unedimension clé pour de nombreux investisseurs, en particulier institutionnels».
Michel Aubry, responsable du département Asset Management de la BCV complète: «Cette recherche améliore le degré de transparence des placements immobiliers suisses et bénéficie à l’ensemble des acteurs de la gestion d’actifs dans notre pays. Dans son domaine, elle est une contribution aux efforts de notre place financière pour renforcer son statut de référence en matière d’investissement socialement responsable.»
L'étude peut être téléchargée sur le site du CRML : https://real-estate.crml.ch/