Développé et coordonné par le CHUV, le projet interdisciplinaire SWISSNEUROREHAB visant à mettre en place un modèle innovant de réhabilitation neurologique vient d’obtenir un financement de projet Flagship de 11,2 millions de francs sur les cinq prochaines années, dont 5,9 millions de la part d'Innosuisse et le reste par les partenaires industriels. Grâce à cet important soutien financier, un consortium rassemblant les principaux acteurs académiques, cliniques et industriels en Suisse travaillera à combiner les approches de neuroréhabilitation conventionnelle avec les nouvelles technologies digitales, pour proposer des prises en charge personnalisées aux patients avec séquelles d’accidents vasculaires cérébraux (AVC), traumatismes crâniens et paraplégies.
En 2021, Innosuisse, l’Agence suisse pour l’encouragement de l’innovation, a débloqué près de 60 millions de francs pour sa nouvelle initiative Flagship, destinée à soutenir des projets interdisciplinaires à haute valeur socio-économique. SWISSNEUROREHAB est un des quinze projets retenus pour cette première édition.
Andrea Serino, Arseny Sokolov et Philippe Ryvlin, professeurs à la Faculté de biologie et de médecine de l'UNIL au sein du Service de neuropsychologie et de neuroréhabilitation du CHUV, ont construit un projet de recherche et un consortium sans précédent, réunissant les principaux acteurs académiques, cliniques et industriels de la neuroréhabilitation suisse. La partie académique comprend entre autre les hôpitaux universitaires de Berne, Genève et Zurich, l’EPFL, l’ETH à Zurich, et les cliniques SUVA. Parmi les partenaires industriels, on retrouve Hocoma, leader mondial des technologies de rééducation du mouvement, les entreprises Cara et Pryv travaillant sur le dossier électronique du patient, la start-up licorne lausannoise MindMaze ainsi que d’autres start-up neurotechnologiques.
Chaque année, en Suisse, 15'000 personnes sont victimes d’un AVC, 5000 personnes subissent un traumatisme crânio-cérébral (TCC) sévère ou modéré et 150 se retrouvent paraplégiques. La neuroréhabilitation prend en charge ces patients avec des équipes interdisciplinaires de physiothérapeutes, ergothérapeutes, logopédistes, neuropsychologues, infirmiers et médecins, qui œuvrent ensemble pour promouvoir la récupération de la marche, de la dextérité manuelle, de la parole, de la mémoire ou encore de la concentration. Souvent, suite à un AVC ou un TCC, les patients restent hospitalisés en neuroréhabilitation pendant des mois, avec plusieurs séances thérapeutiques par jour. La neuroréhabilitation hospitalière en Suisse est parmi les plus spécialisées et performantes du monde.
Toutefois, après le retour du patient à domicile, la neuroréhabilitation ambulatoire reste souvent insuffisante et déconnectée de la prise en charge hospitalière. Pour des raisons pratiques, comme être domicilié loin d’un centre de neuroréhabilitation, mais aussi pour des raisons liées à la couverture d’assurance, le suivi de la plupart des patients se limite à quelques séances thérapeutiques par semaine en lieu et place des séances pluriquotidiennes offertes en milieu hospitalier. Or, la fréquence et l’intensité des séances sont les facteurs principaux déterminant le succès de la neuroréhabilitation et le degré de récupération.
Pour pallier ce problème, le consortium prévoit de développer et d’implémenter un nouveau modèle de neuroréhabilitation personnalisée. Ce modèle comprendra les meilleures options thérapeutiques déjà existantes combinées avec des solutions neurotechnologiques innovantes comme la neurostimulation, la robotique, les exosquelettes, les senseurs, les jeux vidéo et la réalité virtuelle. Ces nouvelles thérapies seront disponibles en clinique, en cabinet, mais aussi à domicile. Le développement d’une plateforme de données commune et intercantonale permettra de suivre et d’optimiser la neuroréhabilitation tout le long du parcours du patient depuis les soins aigus jusqu’à domicile. Des experts en analyse socio-économique participent au projet dans le but de proposer un nouveau système de remboursement défini en collaboration avec les assureurs, incluant les outils technologiques et la télé-réhabilitation.
Dans ce projet, coordonné par le professeur Andrea Serino, le CHUV collabore étroitement avec l’Institution de Lavigny, comme il le fait déjà dans le cadre du nouveau Service universitaire de neuroréhabilitation (SUN). La partie ambulatoire du SUN a notamment été conçue dans l’esprit du projet Flagship, en mettant les neurotechnologies au bénéfice des patients vaudois nécessitant une neuroréhabilitation. Le projet sera un pilier du nouveau Centre de recherche interdisciplinaire en neuroplasticité et neuroréhabilitation (CRINN) mis en œuvre conjointement par le CHUV, l’Université de Lausanne et l’Institution de Lavigny dans le cadre du SUN.
Le professeur Philippe Ryvlin, chef du Service de neuropsychologie et de neuroréhabilitation, et chef du Département des neurosciences cliniques du CHUV souligne que «Le financement Flagship est un élément supplémentaire et décisif pour permettre au SUN de devenir le précurseur et leader international attendu dans l’innovation en neuroréhabilitation, en capacité d’offrir les meilleures prestations à nos patients.»