De septembre 2016 à juin 2021, notre collègue a tenu une chronique mensuelle d’historienne dans le quotidien Le Courrier. Retour sur cette expérience.
Le 22 juin 2021, Alix Heiniger a signé le dernier billet de sa chronique « Aujourd’hui, Hier, Demain » dans Le Courrier. Comment cette histoire a-t-elle commencé ?
Je collaborais déjà épisodiquement avec Le Courrier depuis quelques années. J’ai soumis début 2016 un billet d’opinion à la suite des rassemblements pour la Nouvelle Année en Allemagne, où des femmes avaient été agressées. J’avais été passablement énervée par la manière dont la presse en général s’était déchaînée contre les réfugiés et les étrangers. On y lisait un discours d’extrême droite, qui utilisait la défense des femmes et adoptait une posture prétendument féministe pour tenir des propos racistes. Le ton de mon article a paru intéressant à la rédaction du journal, et cette dernière m’a proposé de réfléchir à l’idée de tenir ma propre chronique. « Aujourd’hui, Hier, Demain » était née.
Était-il facile de trouver, chaque mois ou presque, un nouveau sujet ?
Une des deux règles que je m’étais fixée avant d’accepter cette chronique est que si je n’arrivais pas à trouver un sujet deux mois de suite, j’arrêtais tout de suite. Cela n’est pas arrivé. Trouver le sujet du mois est un exercice extrêmement stimulant intellectuellement. Il s’agit d’éclairer l’actualité avec un regard d’historienne, ce qui permet souvent de dépasser les apparences et de donner une signification sociale et/ou politique aux événements en les inscrivant dans une durée plus longue. Bien souvent les idées naissent en lisant le journal, au fil de l’actualité politique, et mes propres recherches viennent naturellement alimenter ma chronique. Bien sûr, j’avais un frigo avec plusieurs idées qui attendaient leur tour, et un cimetière où j’en ai enterré d’autres. Mais s’il fallait trouver un fil rouge à toutes mes chroniques, c’est l’idée qu’il n’y a pas d’acquis ni de progrès sociaux sans luttes. La notion de pouvoir y est donc bien présente. Je suis profondément convaincue que l’histoire est une discipline émancipatrice, et que c’est, en conséquence, important de saisir cette occasion qui m’a été offerte de m’adresser à un public plus large.
Pourquoi arrêter aujourd’hui, après cinquante-trois chroniques ?
La deuxième règle que je m’étais fixée était de ne pas dépasser 5 ans. J’ai aimé faire ça, et j’aime toujours le faire. Mais je pense que c’est important d’arrêter une activité quand on l’aime encore. Pendant ces 5 ans, j’ai reçu beaucoup de retours positifs, c’était très gratifiant et stimulant, parce que j’avais l’impression d’avoir un public, je n’étais plus toute seule avec mon ordinateur ! Cette expérience a été pour moi en définitive très riche. Je la conseille vivement à celles et ceux voudraient s’essayer à cet exercice !
Alix Heiniger n’aura pas le temps de s’ennuyer. Elle débute cet automne son projet Eccellenza « Espace carcéral et circulations : une histoire transnationale et régionale des prisons suisses (1820–1980) » à l’université de Fribourg, avec son équipe de recherche.
Retrouvez l’intégralité de sa chronique : Aujourd’hui, Hier, Demain.