Dans une étude parue le 6 juillet 2021 dans la revue «e-Life», des scientifiques du Département des neurosciences fondamentales de l’UNIL et du Centre d’antalgie du CHUV expliquent pourquoi des personnes souffrant de douleurs chroniques ont des troubles majeurs du sommeil.
A l’instar des dauphins qui ne dorment que d’un hémisphère cérébral, le cortex somatosensoriel (S1) des souris dort mal en cas de douleur neuropathique expérimentale: il passe spontanément en mode d’éveil. Les patients souffrant de douleurs chroniques ont des troubles majeurs du sommeil, mais les mécanismes neurobiologiques sous-jacents sont encore peu connus.
Issus d’une collaboration entre le Département des neurosciences fondamentales (DNF) de la Faculté de biologie et de médecine (FBM) de l’UNIL et le Centre d’antalgie du CHUV, les travaux publiés dans l’édition du 6 juillet 2021 de la revue e-Life montrent pour la première fois que des souris avec une lésion sur le nerf sciatique, hypersensibles à la douleur, ont des troubles du sommeil.
«La durée des sommeils dits «léger» et «profond» ainsi que la macroarchitecture du sommeil restent similaires aux contrôles, mais c’est dans la partie du cerveau qui reçoit les informations sensorielles discriminatives de la douleur (S1) de la patte arrière que les changements ont lieu, relate Isabelle Decosterd, professeure à la FBM, directrice du Centre d’antalgie du CHUV et codirectrice de l’étude avec la professeure Anita Lüthi (DNF). A cet endroit, les signaux électriques montrent que ce cortex se réveille (on parle de micro-réveils locaux) et cela se traduit par une augmentation synchrone de la fréquence cardiaque.»
Un cercle vicieux qu’il faut interrompre
Les zones du cerveau impliquées dans la composante émotionnelle de la douleur ont un sommeil normal, comme probablement le reste du cerveau. Des modifications structurelles dans le sommeil, qui conduisent à des réveils, ont toutefois été démontrées lors de douleurs. Avec pour conséquence que les souris vont se réveiller bien plus facilement lors d’un stimulus extérieur. Le manque de sommeil pouvant faciliter la douleur, un cercle vicieux s’installe.
«Nos recherches montrent le réel besoin pour des personnes souffrant de douleurs chroniques d’avoir un univers particulièrement calme pour bien dormir, souligne le doctorant Romain Cardis, premier auteur de l’étude. De plus, trouver des moyens pour permettre à ces patients de bénéficier d’un meilleur sommeil pourrait non seulement améliorer leur qualité de vie, mais aussi contribuer à diminuer leurs douleurs. Et réduire les douleurs améliore le sommeil…»