Avec « La mort n’est que le début... de l’enquête du médecin légiste », Silke Grabherr, la directrice du Centre universitaire romand de médecine légale (CURML), partage les facettes de son métier. Loin des paillettes et du faste hollywoodien.
Que se passe-t-il dans la salle d’autopsie ? Comment dater une lésion ? Quel élément explique le plus vraisemblablement le décès ? Une overdose de cocaïne ou une maladie préexistante ? Légiste atypique, Silke Grabherr a récemment publié un ouvrage (éditions Favre) dans lequel elle fait découvrir l’univers des enquêtes médico-légales. À des milliers de kilomètres d’Hollywood, la professeure à la Faculté de biologie et de médecine de l’UNIL remet les pendules à l’heure… suisse. Car si les meurtres et autres crimes ont largement conquis nos écrans et librairies, ces histoires, aussi récréatives soient-elles, biaisent la représentation du véritable travail des légistes.
Au gré d’allers-retours entre la fiction et la réalité, l’auteure relate les facettes du métier, à commencer par les actes et prélèvements pratiqués sur une scène de crime et dans une salle d’autopsie. Viennent ensuite les différents examens qui peuvent être réalisés, notamment toxicologiques et génétiques, pour faire parler les morts. Plus surprenant, un chapitre est consacré aux vivants. Paradoxalement, les médecins légistes interviennent souvent auprès de personnes en vie, par exemple des victimes de violences conjugales ou de cambriolages. Et, parfois, ces pros de la dissection abandonnent leur combinaison stérile pour réaliser des expertises sur la base d’un dossier transmis par la justice. Accessible à chacun, le livre nous immerge dans les coulisses d’une activité à l’intersection entre le droit et la médecine, très médiatisée mais finalement méconnue.
Vite et loin
Lorsqu’elle reprend les rênes du Centre universitaire romand de médecine légale en 2016, à seulement 35 ans, Silke Grabherr est déjà considérée comme la référence mondiale en matière d’angiographie post mortem. Cette technique d’imagerie permet de visualiser les vaisseaux sanguins et d’autopsier « virtuellement » un corps, sans avoir à l’ouvrir.
Pourtant, rien ne prédestinait la jeune autrichienne à une telle carrière. Dans sa famille, personne n’a fait d’études. Silke Grabherr se forme alors en management hôtelier et finance. Férue d’équitation, elle devient championne d’Autriche de dressage à 18 ans. Quelques années plus tard, elle se lance dans des études de médecine à l’Université d’Innsbruck, qu’elle terminera avec une année d’avance. Chez elle, « tout va vite ». Dès de son premier jour de stage à l’Institut de médecine légale de l’Université de Berne, elle sait qu’elle en fera son métier. Ce qui lui plaît : traiter un cas, une affaire dans sa globalité. Et aider les vivants. « En médecine légale aussi, on peut aider les gens. Pas les morts. Ceux qui restent », livre Silke Grabherr.