Anna Wilson mène cette recherche doctorale en administration publique au sein de l’Institut de hautes études en administration publique de la FDCA de l'Université de Lausanne.
Une transition réussie de la formation obligatoire à une formation professionnelle initiale repose bien entendu sur les résultats scolaires mais aussi, lorsqu’il s’agit de formation duale, sur l’accès aux places d’apprentissage. Ces filières de formation, réputées inclusives et avec un bon taux d’employabilité, présentent de grandes disparités en matière d’accès. En effet, les jeunes éligibles n’arrivent pas tous à obtenir une place d’apprentissage. Ceux qui échouent à trouver une place sont typiquement les jeunes qui ont les moins bons résultats scolaires, sont issus de la migration et/ou de milieux socioéconomiques plus défavorisés.
La recherche d’Anna Wilson vise donc à comprendre comment la formation professionnelle initiale inclut ces groupes plutôt défavorisés et quelles mesures sont mises en place pour encourager les entreprises à offrir des places d’apprentissage aux jeunes issus de ces groupes. Cette recherche doctorale fait partie du projet GOVPET (Governance of Vocational and Professional Education and Training), financé par le SEFRI (Secrétariat d'État à la formation, à la recherche et à l'innovation).
L’Etat comme moteur d’inclusion et employeur inclusif
Les principaux efforts pour l’engagement de jeunes issus de groupes défavorisés sont plutôt consentis par l’Etat et les entreprises publiques. Un des articles de la thèse montre que l’engagement et l’implication des entreprises dans ce sens sont moins importants que les mesures externes impulsées par l’Etat (Bonoli and Wilson, 2019). Dans un autre article, Anna Wilson met en évidence que le principal moteur d’égalité sociale des programmes de formation professionnelle reste l’Etat tandis que le camp des employeurs est plus enclin à les utiliser pour des raisons économiques (Di Maio, Graf, Wilson, 2019).
Dans le troisième article de sa thèse, Anna Wilson montre que les employeurs du secteur public sont plus ouverts à engager des jeunes désavantagés comme apprentis que les employeurs du secteur privé (Wilson, 2019). Dans cette étude, contre toute attente, ni l’appartenance à des réseaux de formation ni celle à des associations professionnelles, facteurs pourtant connus comme améliorant la volonté de poursuivre des buts sociaux, ne sont corrélés avec une attitude plus inclusive envers l’engagement en apprentissage de jeunes issus de groupes défavorisés.
Anna Wilson a montré dans une étude sur les formations professionnelles short-tracks en Suisse (Di Maio, Graf, Wilson, 2020) qu’il est possible pour l’Etat de passer un accord avec les employeurs permettant de créer de nouvelles opportunités de formation pour les groupes qui peinent à accéder à l’apprentissage classique. La faible interférence de l’Etat est pourtant considérée comme jouant un rôle clé dans la performance du système de formation professionnelle initiale (VET). La mise en place du cursus short-tracks en Suisse a augmenté l’égalité des opportunités en permettant de faciliter l’accès aux jeunes qui ont des difficultés à obtenir des places d’apprentissage de longue durée, mais pas dans les proportions constatées au Danemark par exemple (Di Maio, Graf, Wilson, 2019). L’implication de l’Etat semble donc nécessaire pour augmenter l’accès des groupes plus défavorisés à la formation professionnelle.
L’importance des convictions personnelles et de la bonne volonté
Si le rôle de l’Etat est significatif, on constate que des employeurs privés montrent également une propension offrir des places d’apprentissage à des jeunes avec de moins bons résultats et/ou issus de groupes désavantagés. Anna Wilson a montré que l’attitude des personnes qui engagent, quel que soit le secteur, détermine fortement la volonté d’offrir des places d’apprentissage à des jeunes mois favorisés (Di Maio, Graf, Wilson, 2019), (Wilson, 2019).
Lorsque l’on regarde plus précisément les individus qui engagent des apprentis dans le secteur privé du Canton de Vaud (Wilson, 2019), on constate une tendance à accorder moins d’importance aux résultats scolaires ou à ceux de tests d’aptitude. Cela montre que le secteur n’explique pas toutes les variations et que le comportement égalitaire des individus est aussi significatif. Le dénominateur commun est bien la relation personnelle entre le formateur de terrain et l’entreprise, et son inclination personnelle à agir pour une société plus égalitaire.
Pour résumé, les conditions plus inclusives se trouvent lorsque l’environnement de l’entreprise est favorable, c’est-à-dire lorsque le profit est mis au second plan, lorsque des formateurs entre autres ressources sont disponibles dans l’entreprise, lorsque la formation n’est pas trop théorique et enfin lorsqu’il y a une croyance personnelle dans le fait de donner une chance aux moins bons jeunes.
Anna Wilson mène cette recherche doctorale à l'IDHEAP sous la direction du Professeur Giuliano Bonoli. Elle soutient sa thèse le 24 novembre 2020.