Le professeur Patrick Bodenmann rejoint l’équipe décanale de la Faculté de biologie et de médecine (FBM): le chef du Département vulnérabilités et médecine sociale d’Unisanté endossera, dès le 1er août 2020, le rôle de vice-Doyen à l’enseignement et à la formation. Alors qu’il prend déjà ses marques, il évoque sa prochaine entrée en fonction dans une année 2020 marquée par la crise du Covid-19.
Quels enjeux identifiez-vous, à ce stade, dans votre nouveau Dicastère ?
Il y aura bien sûr toute la réaction au Covid-19. Nous devrons répondre à des questions très concrètes, portant notamment sur l’évaluation de l’enseignement, sur les modalités d’examen, dans une année où tout a été bousculé. C’est un des points essentiels, et cela va nous occuper une bonne partie de l’année en cours. Il va très probablement en sortir du positif : certes nous avons été forcés par les circonstances à mettre en place un enseignement en non-présentiel, mais cela nous offre aussi une palette d’outils intéressants. Un autre élément important pour 2020 sera l’accréditation de l’Ecole de médecine. Dans ce contexte particulier, et en général, l’enseignement de l’interdisciplinarité reste aussi un défi important.
Notamment avec les soins infirmiers ?
Tout à fait. L’Institut universitaire de formation et de recherche en soins (IUFRS), qui forme aux métiers de demain, et notamment à la pratique infirmière avancée, sera un des acteurs essentiels. C’est quelque chose d’assez naturel pour moi, puisque nous avons à Unisanté beaucoup d’infirmières ou d’infirmiers que nous décrivons comme étant de « première ligne » (IPL) : ces personnes sont habilitées à poser certains diagnostics et prescrire certains médicaments. Avec les IPL, nous avons mis en place une solution pragmatique, qui répond à la logique du besoin ; mais Unisanté ne délivre pas, bien sûr, de formation « mastérisante » en la matière, contrairement à l’IUFRS. Il sera dès lors intéressant de travailler sur la question de la certification et de la professionnalisation de la pratique infirmière avancée, en apportant depuis Unisanté ma sensibilité du terrain.
Quel est votre rapport avec la recherche fondamentale – l’autre versant de la FBM ?
Je suis d’abord un clinicien qui fais de la recherche clinique, et c’est aussi à ce titre qu’on m’a demandé de venir au Décanat. J’aurai donc beaucoup à apprendre dans d’autres domaines, tels que la recherche fondamentale. En parlant d’enjeux, il me faut ici faire preuve d’humilité : il y a certains dossiers qui me sont proches, qui touchent à ma pratique, notamment via l’Ecole de médecine ou l’IUFRS, et pour lesquels j’ai déjà quelques idées et propositions ; mais il y a d’autres secteurs, d’autres écoles dont je n’ai encore qu’une connaissance limitée, et pour lesquels il me faudra plus de temps de lecture et d’échanges. J’y serai particulièrement attentif.
Qu’est-ce qui vous a séduit dans cette fonction de vice-Doyen à l’enseignement et à la formation ?
J’ai toujours eu un intérêt marqué pour l’enseignement et la pédagogie médicale. J’aime être en contact avec les étudiants : je trouve cela très « ressourçant ». Parallèlement à cela, je suis actif dans diverses structures, comme la COMSKILLS ou la supervision d’examens. Je suis également membre depuis des années du Conseil de faculté, que je vais devoir quitter suite à ma nomination. Arriver aujourd’hui au Décanat au sein d’une équipe très expérimentée, puisqu’elle arrive au bout de son double mandat (ndlr : le 31 juillet 2021), c’est aussi pour moi une formidable opportunité d’apprendre au contact de ses membres. Et le passage de témoin avec la vice-Doyenne sortante, la professeure Isabelle Décosterd, se passe très bien.
Vous apportez aussi votre propre vision, celle de l’interniste-généraliste, et du spécialiste des populations en situation de vulnérabilité…
C’est vrai. L’équité en santé, l’équité dans les soins est depuis des années mon cheval de bataille. J’ai d’ailleurs un double bagage, en médecine interne ambulatoire mais aussi en santé publique, avec un Master à la London School of Hygiene & Tropical Medicine. Cela va forcément infuser mon approche de vice-Doyen à l’enseignement. Deux livres encore m’ont beaucoup apporté au cours de mes années d’enseignement : Teacher Man, de Frank McCourt, et Teachers as Cultural Workers, de Paulo Freire, ce dernier mettant en rapport pédagogie et inégalités. Ces deux ouvrages, avec des angles d’approche différents, m’ont beaucoup fait réfléchir à la responsabilité de l’enseignant et à l’immense opportunité qu’il a de pouvoir partager son savoir.