Un Pôle de recherche national dédié aux écosystèmes microbiens est attribué à l’Université de Lausanne, en collaboration avec l’École polytechnique fédérale de Zurich.
Ils sont partout. Dans nos intestins, dans les sols, les rivières ou les océans. Estimés à 100'000 milliards par corps humain, les micro-organismes forment des communautés invisibles appelées « microbiomes ». Centrales pour notre qualité de vie et notre environnement, ces populations nous aident à digérer, renforcent notre système immunitaire, améliorent la fertilité des sols ou encore détruisent les déchets. Cependant leur fonctionnement nous échappe.
Pour percer les mystères de ce monde microscopique, le Fonds national suisse a confié à l’Université de Lausanne la création d’un Pôle de recherche national (PRN) dédié à l’étude des sociétés de bactéries. Intitulé Microbiomes, ce programme commencera en 2020 et sera dirigé par le prof. Jan Roelof van der Meer, directeur du Département de microbiologie fondamentale (DMF) de l’UNIL, en collaboration avec la prof. Julia Vorholt de l’École polytechnique fédérale de Zurich. Ensemble, ils coordonneront une équipe interdisciplinaire de vingt experts reconnus à l’international. Des scientifiques issus des deux institutions et de leurs partenaires : le Centre hospitalier universitaire vaudois, l’École polytechnique de Lausanne, et les Universités de Berne et Zurich.
« Ce programme de recherche est très important pour l’UNIL car il est un bel exemple de transdisciplinarité. Il touche aussi bien la santé que le monde végétal, animal ou l’environnement et met en relation des chercheurs au niveau national et international », a réagi François Bussy, vice-recteur en charge de la recherche et des relations internationales.
Lancé pour une première phase de quatre ans, ce PRN vise le développement de la recherche sur une plus longue durée, notamment via la constitution à l’UNIL d’un « Center for microbiome studies ».
Cibler des espèces
À travers des recherches expérimentales ainsi qu’un volet de modélisation de données, les scientifiques tenteront de déterminer le rôle et l’influence de certaines espèces de bactéries sur leur milieu. Ils poseront une question basique : est-il possible d’intervenir de manière ciblée sur la composition des microbiomes et d’en maîtriser les effets ? « Si nous y parvenons, cela ouvrirait de nombreux horizons, non seulement dans le domaine de la santé, de l’élevage avec par exemple le développement d’alternatives aux antibiotiques, mais aussi de la nutrition, l’agriculture et l’environnement », estime Jan Roelof van der Meer.
Aujourd’hui, de plus en plus de corrélations sont découvertes entre le fragile équilibre des microbiomes et des problèmes comme le diabète ou le surpoids, ainsi qu’en matière d’écologie. « On parle partout d’une perte de fertilité des sols et de leurs émissions de méthanes. Or, nous savons que ces problèmes sont liés aux écosystèmes microbiens. »
Un hub de spécialistes
A l’UNIL, l’expertise des scientifiques en matière de microbiome sera mise au service du PRN. Au sein du DMF, Jan Roelof van der Meer et son équipe se concentrent sur la pollution et les sols, le laboratoire du prof. Philipp Engel étudie les populations qui peuplent les intestins des abeilles. Celui du prof. Tadeusz J. Kawecki se penche sur celles de la mouche Drosophila melanogaster, l’équipe de la prof. Sara Mitri décortique les interactions sociales des microbes, le groupe de la prof. Yolanda Schaerli emploie des techniques de biologie synthétique permettant de recréer artificiellement les conditions de vies des écosystèmes. Les interactions de bactéries avec les plantes sont, elles, analysées par le maître d’enseignement et de recherche Christophe Keel et le directeur du Département d’écologie et d’évolution, Ian Sanders. Enfin, les collaborateurs du prof. Gilbert Greub de l’Institut universitaire de microbiologie et du prof. Benoît Guery du CHUV se dirigent eux vers les questions cliniques.
« Également experte en microbiologie, bioinformatique et en modélisation computationnelle de l’environnement biologique, les spécialisations de l’EPFZ sont complémentaires. Notre association était évidente », conclut Jan Roelof van der Meer.