A l’UNIL, une structure est dédiée au soutien aux carrières des doctorants et des postdoctorants. Le point deux ans et demi après son lancement avec son adjoint Benjamin Rudaz et la responsable Conseils en carrières Verity Elston.
Pourquoi ce service a-t-il été mis en place en avril 2017 ?
B.R. : Le contexte national et international de la recherche a beaucoup changé ces 20 dernières années, et continue d’évoluer. Par exemple, le nombre de doctorants a énormément cru pour presque doubler, par exemple. Or, les études effectuées à l’UNIL et au niveau suisse montrent que seulement 30% de ces personnes poursuivent une carrière « traditionnelle », soit en visant in fine un poste de professeur. L’idée était donc de proposer aux chercheurs et chercheuses un service transversal pour les soutenir et les accompagner pendant leur parcours à l’UNIL, quelle que soit leur faculté, leur objectif et leur niveau. Nous avons à Lausanne plus de 2200 doctorants et 400 postdoctorants. Un public composé de profils très différents qui ont besoin de conseils personnalisés. L’enjeu est surtout de leur donner les moyens d’être préparés, autonomes et épanouis dans leur projet professionnel. C’est avec cette mission en tête que la Direction a décidé de mettre sur pied le Graduate Campus.
Quelles démarches ont été entreprises jusqu’à maintenant ?
V.E. : Nous travaillons avec les facultés et orientons les personnes vers les ressources déjà à disposition, instaurées par exemple par le Service d’orientation et carrières ou le Bureau de l’égalité. Nous proposons également des séances de conseils individuelles, j'ai reçu presque 50 personnes en une année qui ont suivi une à cinq séances chacune. A quoi s'ajoutent des ateliers dédiés à plus d'une vingtaine de thèmes concernant spécifiquement les doctorants ou les postdoctorants, comme "Bien démarrer sa thèse", "Project Management for Research", "Your Professional Profile", "Comment préparer une bourse de mobilité FNS" ou "Interviews for non-academic opportunities". Finalement, tous les mois, j’anime un « Café carrière » destiné à notre communauté de jeunes chercheuses et chercheurs. Il s’agit d’un rendez-vous de deux heures comptant chaque fois plus d’une dizaine de participants. Nous échangeons à propos du développement professionnel et je les aide à faire une première identification de leurs compétences et de leurs objectifs professionnels grâce à un référentiel que nous avons confectionné avec les facultés. Les participants se renseignent sur l’offre de conseils et de formations sur le campus et ailleurs. Ils rencontrent des personnes qui se posent les mêmes questions qu'eux.
B.R. : Pour favoriser le bon déroulement des thèses de doctorat, une « charte du doctorat » – disponible sur notre site internet – a également été réalisée avec l’aide des doctorants et des superviseurs de toutes les facultés. Ce document décrit les rôles et les responsabilités de chacun et permet d’orienter les discussions, notamment en matière de carrière. En effet, la personne qui supervise la thèse joue un rôle crucial, en particulier pour la carrière académique. C’est le directeur ou la directrice de thèse qui peut faire bénéficier le ou la doctorante de son réseau. Toutefois, si le projet de carrière du doctorant ou du postdoctorant s’oriente hors du domaine académique, il peut y avoir une gêne à en discuter, de part et d’autre. C’est là que le Graduate Campus joue un rôle important.
Quel bilan tirez-vous deux ans et demi après le lancement du Graduate Campus ?
B.R. : Le moins que l’on puisse dire est que notre structure est plus que pertinente, et que ses services sont demandés et appréciés. Nous adaptons en permanence notre offre, suivant les évaluations de nos ateliers, ainsi qu’en favorisant la création de nouvelles activités. Un budget spécifique de 20'000 francs par année permet de financer de nouveaux ateliers, conçus et organisés par des doctorants ou postdoctorants, dont plusieurs sont désormais intégrés à notre offre. Le but original était également de réduire l’isolement des chercheurs en leur permettant de se rencontrer, et par le partage d’expérience, de renforcer le sentiment de communauté. Là aussi le bilan est positif.
V.E. : Nous répondons à une réelle demande. Notre offre est adaptée pour permettre à ceux qui n’ont pas la possibilité de se libérer une journée entière de suivre une activité sur une plus courte durée, par exemple à la pause de midi. Les « Cafés carrière » ont du succès et nos ateliers sont pleins. Les consultations individuelles de carrière ont déjà permis à 90 personnes de bénéficier soit de conseils ponctuels, soit d’un accompagnement sur la durée. Ces prestations sont très appréciées, car elles s’adaptent aux besoins des personnes.
Vous avez lancé en janvier une étude sur les doctorants de l’UNIL diplômés entre 2007 et 2017. Où en est-elle à ce jour ?
B.R. : Cette enquête est encore en cours mais porte déjà ses fruits. Nous avons tenté de reprendre contact avec ces 2400 alumni pour comprendre leurs trajectoires. Nous sommes parvenus à en interroger environ 450 à l’aide d’un questionnaire semi-dirigé. L’idée est de fournir aux facultés des données sur le devenir de leurs docteurs et d’inviter éventuellement ces personnes à venir témoigner de leur parcours lors d’événements dédiés aux carrières.
V.E. : Nous sommes l’une des seules universités de Suisse à avoir entamé concrètement cette enquête. Nous bénéficions désormais d’une base d’adresses d’individus motivés à revenir sur le campus pour parler de leur propre expérience. C’est vraiment très précieux, car qui de mieux placé pour illustrer les possibilités et la diversité de carrières qu’un groupe d’alumni de l’UNIL ? Les facultés pourront grâce à ce carnet d’adresses étendre leurs offres d’événements centrés sur les carrières, comme cela se fait déjà en faculté de Biologie et de Médecine avec le Life Science Career Day.
Quels sont les projets à venir ?
V.E. : Nous essayons, en collaboration avec le Centre de soutien à l’enseignement et ColLaboratoire, l’Unité de recherche-action collaborative et participative chargée notamment de conseiller la Direction, de développer le concept du workshop « We Scientists 2035 », issu de l’Académie suisse des sciences naturelles, auquel nous aimerions à l’avenir intégrer toutes les facultés. Cet événement [ndlr : qui a eu lieu en février dernier à l’UNIL] réunit des chercheurs de tout niveau pour réfléchir à la façon dont la recherche va évoluer ces prochaines décennies.
B.R. : En parallèle à ces conseils et appuis individuels, le Graduate Campus et la Direction de l’UNIL ont lancé une démarche de stratégie et de planification des postes de premiers assistants et de maîtres assistants. Chaque faculté doit d’ici la fin 2019 se doter de définitions de trajectoires de carrière idéale, clarifier les stratégies de recrutement pour les postes de niveau postdoctoral, et proposer des mesures d’accompagnement. Le choix de décliner une stratégie au niveau facultaire et non pour toute l’UNIL permet de tenir compte des pratiques et usages propres à chaque discipline académique. Cette démarche va dès 2020 ancrer de manière structurelle une politique qualitative, pour que les personnes recrutées sur ces postes puissent mieux anticiper et construire leurs projets d’avenir de manière sereine.