Séminaire du LaDHUL, automne 2018
La numérisation de la société confronte les sciences humaines et sociales à un double défi, à savoir de contribuer à la compréhension des dynamiques et des enjeux à l’œuvre tout en étant elles-mêmes bouleversées au plus profond de leurs pratiques scientifiques. Pour ce semestre d’automne 2018, le LaDHUL propose de questionner ce que le numérique fait aux sciences humaines et sociales : du machine learning aux traces numériques en passant par la visualisation de données, les conditions pratiques de la recherche en sciences sociales ont significativement changé. Ces séances ont vocation à problématiser et à illustrer cette dynamique en questionnant les enjeux relatifs aux les sources, à leur traitement et à leur représentation. En cela, le séminaire s’inscrit dans la ligne des préoccupations à l’origine du récent appel à projets du FNS (Digital Lives) portant sur la numérisation conjointe des sociétés et des SHS.
Mercredi 17 octobre 2018 - Etienne Ollion (CNRS, Université de Strasbourg)
Machine learning et sciences sociales : savoirs liés?
L'engouement pour l'intelligence artificielle (ou machine learning) touche de nombreux secteurs. Les sciences sociales ne sont pas en reste, mais ne savent pas toujours comment utiliser ces techniques. Favorisant la prédiction plutôt que l'explication, manquant toujours de bases théoriques fermement établies et fournissant des résultats à l'optimalité le plus souvent incertaine, le machine learning suscite un intérêt certain, quoique mâtiné de réserves. L'objectif de cette présentation est de mener de front une double interrogation: que peuvent faire les sciences (sociales) avec le machine learning? Que peut faire l'introduction du machine learning aux sciences sociales? A travers une série d'exemples, cette présentation abordera les enjeux saillants que pose ce nouveau domaine, comme les déplacements qu'il ne manquera pas de produire.
Mercredi 21 novembre 2018 - Dario Rodighiero (MIT, DH)
Traduire les données en images
Le processus de conception consiste en une série d’efforts visant à résoudre un problème, défini par extension comme un besoin, une tâche, une situation, etc. Les visualisations sont des objets résultant d’un processus de conception qui résout un problème de données autrement illisibles. Ce sont des médiateurs techniques qui transforment les données en images selon un point de vue adopté par l’auteur, qui définit leur contexte social et politique. Une façon de comprendre les visualisations est d'analyser le processus de leur conception : cette approche, appliquée ici à un projet appelé Affinity Map, permet de mettre en évidence la complexité d'un objet et d’expliciter les raisons de sa création. Le processus de conception sera exposé selon les principales étapes qui ont mené à la visualisation finale, en les discutant en termes de données, de choix et de représentations.
Mercredi 19 décembre 2018 - Dominique Boullier (EPFL, IDH)
Des propagations aux réplications: méthodes et traces
Les plates-formes numériques ( des réseaux sociaux à l'IoT) génèrent et exploitent des traces toujours plus nombreuses. Les sciences sociales, dans certaines conditions, peuvent enfin bénéficier d'un terrain quasi expérimental pour étudier les processus de propagation, de contagion et d'influence et rendre compte en particulier du pouvoir d'agir des entités qui circulent, que je propose de penser comme réplications. Cela permet de compléter les pouvoirs d'agir des structures d'un côté et des préférences individuelles de l'autre, qui ont été formalisés par les précédentes époques de quantification du social. Mais cela nécessite aussi un compromis technicopolitique avec les plates-formes comme cela fut le cas avec les états, puis avec les médias, pour pouvoir accéder à ces traces, dans un moment où le laisser-faire dans ce domaine devient politiquement inadmissible (privacy, RGPD, etc.)
Les séminaires ont lieu de 13h15 à 15h00 à la salle GEO 5799.
Coordination: Nicolas Baya-Laffite et Boris Beaude