A l’Institut des sciences sociales, les enseignants Marc Perrenoud et Pierre-Emmanuel Sorignet ont développé un projet FIP (Fonds d'innovation pédagogique) dans le cadre de leur atelier pratique de recherche « Sociologie du travail artistique ».
Visant l’approche du learning by doing, les étudiant·e·s et enseignants ont créé un spectacle qui a été présenté en juin dernier au Théatre Sévelin 36.
Questions-réponses avec les enseignants.
Quel est l’objectif du projet ?
Donner aux étudiant·e·s de Master s’intéressant aux arts et à la culture un point de vue « de l’intérieur » sur ces mondes socio-professionnels qui sont si souvent l’objet de représentations enchantées. « L’art et la culture » ce sont d’abord des gens qui travaillent, qui exercent des métiers très différents, occupent des positions sociales très différentes aussi, dans un espace fortement concurrentiel et finalement assez peu régulé. Il y a là des situations de travail, des processus de création, mais aussi des enjeux de pouvoir qui sont fascinants à étudier. C'est aussi l'occasion d'analyser les processus vocationnels qui sont au coeur de l'engagement et le maintien dans ces activités.
Comment les cours se sont-ils déroulés ?
Il s’agit bien d’un Atelier pratique de recherche, ce qui est assez différent d’un « cours » classique : Chaque mardi, nous avons passé la journée entière dans un lieu du spectacle vivant dans l’agglomération lausannoise. La Manufacture, le Théâtre Vidy-Lausanne, le Dansomètre à Vevey, l’Octogone à Pully, l’Arsenic et bien sûr le Théâtre Sévelin 36 ont été nos partenaires et nous ont ouvert leurs portes pour que les étudiant.e.s découvrent des structures, des équipes, des histoires et des modes d’engagement à chaque fois différents. Au cours de chaque journée de l’Atelier de recherche, nous avons alterné des moments de travail chorégraphique pour les étudiant.e.s, des rencontres avec des professionnel·le·s (intervant·e·s chorégraphes, tables-rondes avec des administratifs, des programmateurs etc.), et des moments de cours plus classiquement académiques, mais toujours en training dans un studio de danse, ce qui modifie déjà beaucoup le dispositif pédagogique habituel.
L'objectif était de faire un aller-retour constant et exigeant entre le terrain et l'usage des concepts. La méthode ethnographique, au coeur de notre démarche avait pour enjeu de donner aux étudiants la possibilité de se saisir des logiques pratiques des acteurs.
Comment les étudiant·e·s ont évalué l’expérience vécue ?
Compte tenu du fait que le monde du spectacle vivant contemporain était inconnu pour une grande majorité, l’expérience les a « bousculés » dans le bon sens du terme. Le fait de suivre tout un enseignement «hors les murs », en découvrant ces lieux et ces gens, mais aussi en s’engageant dans une pratique à la fois chorégraphique et sociologique reposant sur la réflexivité, tout cela les a fait sortir de leur « zone de confort ». Pour la plupart cela a visiblement été une expérience très forte, certains nous ont même dit que cela avait changé leur vie…
Comment évaluez-vous le projet ?
Cet enseignement est largement expérimental, nous nous interrogeons en permanence sur nos pratiques pédagogiques, nous sortons aussi de notre confort d’enseignants universitaires dans un cadre classique. Ce n’est pas facile, cela demande une implication maximale, dès l’année qui précède la tenue de l’Atelier pour nouer les partenariats avec les structures qui nous accueillent et établir un calendrier, puis au cours du semestre pour accompagner les étudiant·e·s dans un processus pédagogique relativement exigeant. C’est épuisant, mais tellement passionnant !