Longtemps confondue avec une autre espèce, une rainette vient d'être identifiée par des biologistes principalement basés à l'UNIL. Ce petit animal porte le nom de Nicolas Perrin, professeur au Département d'écologie et d'évolution, qui vient de donner sa leçon d'adieu.
La rainette de Perrin ressemble comme deux gouttes d'eau à la rainette italienne, avec laquelle elle a été confondue jusqu'à aujourd'hui. Son chant est également indiscernable. Pourtant, il s'agit d'un tout autre animal. Les spécimens de référence (holotype) ont été collectés à Piazzogna, non loin de Locarno, même si cet amphibien vit également dans la plaine du Pô. L'un d'entre eux a été déposé au Musée de zoologie de Lausanne. Cette découverte est importante, car "il est rare de découvrir un nouveau vertébré en Europe, et encore plus en Suisse", note le biologiste Christophe Dufresnes, du Département d'écologie et évolution (DEE) de l'UNIL.
Signé par une vingtaine de chercheurs (et d'anciens chercheurs) de l'UNIL, un article encore à paraître soumis à la revue Frontiers in Ecology & Evolution donne tous les détails sur cette identification. Sur le plan scientifique, l’étude combine de nombreuses techniques, dont la génomique, la bioacoustique et l'analyse de niche écologique.
Mais la "rainette de Perrin", c'est également une histoire d'amitié. Elle tire donc son nom de Nicolas Perrin, professeur ordinaire au DEE. "Il faudrait plutôt dire professeur extraordinaire", relève Laurent Keller, directeur de ce département.
C'est le 21 juin, lors de la leçon d'adieu de Nicolas Perrin (un évènement qui marque le départ à la retraite d'un enseignant), que cet hommage a été dévoilé au public. Les amphibiens constituent l'un des champs d'expertise du chercheur, qui se passionne pour la vie sauvage depuis son enfance à Grandson. Au fil de sa conférence devant une salle comble, le biologiste a comparé sa carrière professionnelle à un fleuve, qui suit des méandres et de développe de manière inattendue.
Lors de ses années de gymnase à Lausanne, il s'est plongé dans les écrits de Konrad Lorenz afin d'assouvir son intérêt pour le comportement animal. Sa thèse, soutenue à l'UNIL en 1984 et placée sous la direction de J. S. Jones (University College de Londres), portait sur les escargots. Ses recherches post-doctorales suivantes ont tourné autour des bouquetins en Suisse et de la question de la niche écologique.
Nicolas Perrin commence sa carrière de professeur à l'UNIL en 1996, un poste qu'il partage alors avec Laurent Keller, spécialiste bien connu des fourmis. Sa carrière part alors dans une autre direction, quand il s'intéresse à la dispersion, c'est à dire aux mouvements des populations d'êtres vivants dans l'espace, notamment dans un but de reproduction. Chez les mammifères par exemple, il est fréquent que les mâles se déplacent, ce qui possède des avantages et des risques pour une espèce. Pour ces travaux, il collabore avec le mathématicien russe Vladimir Mazalov, spécialiste de la théorie des jeux.
Enfin, plus récemment, Nicolas Perrin s'est penché sur la génétique des populations. Ses travaux sur les mécanismes qui déterminent le sexe chez la grenouille rousse sont par exemple présentés dans une édition toute récente de L'uniscope, le magazine du campus de l'UNIL.
Des grèbes huppés du lac de Neuchâtel aux amphibiens, en passant par les musaraignes ou les daphnies, la carrière de Nicolas Perrin démontre l'étendue de ses intérêts. "L'aller-retour entre l'émotion esthétique ressentie face aux animaux et la curiosité intellectuelle est mon moteur", a-t-il indiqué lors de sa leçon d'adieu.
Contact pour les questions scientifiques : Christophe Dufresnes