La Réserve fédérale américaine publie les 21 et 28 juin les résultats de son huitième test de résistance annuel, communément appelé CCAR (Comprehensive Capital Analysis and Review). Des recherches récentes menées par les professeur·e·s Diane Pierret et Roberto Steri à la Faculté des HEC de l'Université de Lausanne soulignent le rôle du contrôle des risques des banques par le régulateur dans les stress tests.
La Réserve fédérale américaine s’apprête à publier les résultats de son huitième test de résistance annuel, communément appelé CCAR (Comprehensive Capital Analysis and Review). Les résultats, attendus par les investisseurs, seront divulgués en deux étapes: l’évaluation quantitative le 21 juin et la partie complète avec évaluation qualitative le 28 juin. L’évaluation quantitative examine l’adéquation des fonds propres des banques, garantissant qu’elles disposent de réserves de capital suffisantes pour absorber des pertes sévères dans le cas d’un scénario de crise défini par la Réserve fédérale. Cette dernière évalue en outre la planification des immobilisations de capital et les pratiques de gestion du risque dans la partie qualitative du CCAR.
Cette année, seules les 18 plus grandes banques sur les 38 soumises au CCAR, feront l’objet de l’évaluation qualitative. Ce qui reflète une tendance émergente aux États-Unis à assouplir la réglementation (et les coûts qui en découlent) en faveur des banques. L’année dernière, la Chambre de Représentants a adopté le Financial Choice Act prévoyant diverses réformes à la Loi Dodd-Frank. Parmi les propositions, la règle « off-ramp » (bretelle de sortie) permettrait aux banques d’être exemptées du CCAR si leur ratio fonds propres / actifs est supérieur à 10 %.
Résultats des travaux de recherche des Prof. Diane Pierret et Roberto Steri, HEC Lausanne
Des recherches récentes menées par les professeur·e·s Pierret et Steri soulignent le rôle du contrôle régulatoire par des tests de résistance (comme le CCAR) dans la réduction des incitations des banques à prendre des risques quand celles-ci sont soumises à des exigences de capital plus élevées.
Dans leur article «Stressed Banks», ils montrent l’effet contrasté des tests de résistance sur la prise de risque des banques. D’un côté, les tests de résistance augmentent les exigences de capital des banques, obligeant ces dernières à se financer elles-mêmes avec davantage de fonds propres. En moyenne, les banques soumises au CCAR font face à des exigences de capital plus strictes que les autres banques, à savoir 6,8% contre 3% des actifs. Des exigences de capital plus élevées font grimper le coût de financement supporté par les banques lorsque les fonds propres sont plus coûteux que la dette. Les banques confrontées à des coûts plus importants pourraient réagir de manière rationnelle en modifiant la composition de leur portefeuille au profit d’actifs plus rentables et par conséquent plus risqués. D’un autre côté, les auteurs montrent que les tests de résistance peuvent atténuer le canal du risque par rapport aux exigences de capital, par le biais d’un suivi plus détaillé des risques que contiennent les actifs des banques. Ils constatent que les banques examinées par la Réserve fédérale dans le CCAR sont plus prudentes que les autres banques, après avoir contrôlé la réponse de ces dernières aux exigences de capital plus strictes auxquelles elles sont confrontées.
Leurs résultats suggèrent que des exigences de capital plus élevés ne peuvent se substituer à la surveillance règlementaire, mais qu’elles doivent s’accompagner d’un suivi supplémentaire du risque des actifs des banques, en plus des exigences de capital basées sur les actifs pondérés en fonction des risques dans les accords de Bâle. Bien que la règle «off-ramp» n’ait pas été adoptée par le Sénat, l’éventualité d’un retour d’une telle règle et le débat sur le coût du CCAR pour les banques sont encore très présents. L’analyse des incitations à la prise de risque des banques soumises aux stress tests devrait être prise en considération à la lumière ce débat.