La cinquième rencontre du programme « Sauvageons en ville » s’est tenue mercredi 6 juin sur le campus de l’UNIL. Elle avait pour thème « Les chouettes citadines », présenté par le spécialiste en la matière Alexandre Roulin.
En chemin vers la bergerie depuis l’Amphimax, un petit groupe fait plusieurs haltes au gré du chant des oiseaux. Avant de réussir à voir quelque chose, il faut surtout savoir aiguiser son ouïe. Conseil de spécialiste, et pas n’importe lequel. La cinquième rencontre des « Sauvageons en ville », sur le thème de la chouette, est animée par Alexandre Roulin, professeur au Département d’écologie et évolution. Il est un peu plus de 18h sur le campus de l’UNIL.
Lors de sa présentation, l’ornithologue raconte son animal fétiche à une vingtaine d’âmes. Parmi les sauvageons du jour : enfants en bas âge, retraités, passionnés, simples curieux, membres de l’UNIL ou de services d’urbanisme de communes avoisinantes. Il faudra toutefois se contenter de reproductions pour étayer le propos, les bébés chouettes sont encore trop petits pour être approchés. « Il y a peu de faînes (le fruit du hêtre, ndlr) dont se nourrissent les mulots, explique Alexandre Roulin. Ces rongeurs sont fondamentaux pour l’alimentation des chouettes hulottes, mais aussi pour les chouettes effraies et leur cycle de reproduction », plus tardif cette année.
Chouettes ou hiboux ?
Une première question se fait rapidement entendre : pourquoi des chouettes et pourquoi des hiboux ? « Il n’y a pas de différence génétique », répond le chercheur. Ces rapaces constituent deux grandes familles que sont les strigidae (hiboux et la plupart des chouettes) et les tytonidae (les espèces effraies). On peut toutefois les distinguer aux aigrettes des hiboux, ces ornements placés sur le haut de la tête.
Tous se trouvent bien sous nos latitudes. Voire même sous nos toits. Car la chouette effraie est liée à l’humain, précise le chercheur. Comme elle aime nicher dans de petits espaces, il n’est pas rare de la trouver dans des canaux ou tuyaux d’aération. Problème : « l’homme essaie de se débarrasser des nuisances. Les chouettes effraies étaient par exemple connues pour nicher dans des clochers, mais aujourd’hui on met de plus en plus de grillages à certains édifices. » Raison pour laquelle il est important d’aider ses amis à plumes, notamment en leur construisant des nichoirs. Mais pas seulement.
L’alliée politique
La chouette compte parmi les animaux cosmopolites et à grande dispersion. Selon Alexandre Roulin, il est dès lors primordial de mailler au mieux les territoires d'abris adaptés. Un travail qui demande une coordination entre pays, et aux bienfaits insoupçonnés.
Le chercheur œuvre depuis plusieurs années sur un projet pour la paix, initié sur la base d’un travail scientifique. « De nombreux agriculteurs israéliens utilisaient des rodenticides pour lutter contre les rongeurs dans les champs. Sauf que ce poison, accumulé dans l’organisme des chouettes, engendre aussi leur mort. En voulant se débarrasser des rongeurs, les agriculteurs éradiquent donc leurs prédateurs naturels. C’est un peu le serpent qui se mord la queue. » Un long travail d’installation de nichoirs démarre alors. « Et comme la chouette disperse facilement d’une région à une autre, il faut que les territoires voisins se coordonnent. Et donc discutent. » En l’occurrence Israël, la Palestine et la Jordanie. Ce projet pourrait par ailleurs servir de porte d’entrée diplomatique à la Suisse dans les discussions et négociations entre israéliens et palestiniens, selon le scientifique.
Sauvageons
Les rencontres « Sauvageons en ville » sont ouvertes à tous. Organisées par le laboratoire public de l’UNIL L’éprouvette, en collaboration avec le Musée et jardins botaniques cantonaux ainsi que la Ville de Lausanne, elles visent à faire dialoguer professionnels et citoyens autour de la nature en ville, ses enjeux, et le rapport qu’entretient l’humain avec son environnement. Les balades ont lieu en soirée, chacune sur un thème en particulier, et détaillés sur le site internet des sauvageons.