Quand peut-on dire qu’un produit alimentaire est « suisse » ? Un ouvrage qui vient de paraître retrace de manière claire la saga des indications de provenance, des coulisses du Parlement aux frigos des consommateurs.
Même si ses autres ingrédients proviennent du bout du monde, une bière faite avec de l’eau argovienne pourra porter un drapeau suisse sur son étiquette. Il en est de même pour un yoghourt aux abricots turcs, mais dont le lait et le sucre proviennent des terres helvètes.
Comment en est-on arrivé à formaliser ainsi les conditions auxquelles une indication de provenance peut être utilisée sur des produits, un ensemble de règles regroupé sous le terme Swissness ? La réponse se trouve dans Manger suisse. Qui décide ?, un ouvrage sorti au "Savoir suisse" (Presses polytechniques et universitaires romandes). Parmi ses quatre co-auteurs figurent trois chercheurs de l’UNIL, Stéphane Boisseaux, Jean-Philippe Leresche et Rémi Schweizer. Cette collection de poche, qui valorise la recherche auprès d’un large public, se dote ce printemps d’une nouvelle maquette.
La saga de la croix blanche
De manière claire, l’ouvrage raconte une véritable saga : comment a-t-on réussi à déterminer les règles qui dictent quel produit a le droit de porter la croix blanche, et lequel ne le peut pas ? Si l’histoire remonte loin, les nouvelles lois fédérales concernées, soit la protection des marques et des indications de provenance (LPM) ainsi que la protection des armoiries de la Suisse et des autres signes publics (LPAP), ne sont entrées en vigueur que le 1er janvier 2017.
Les auteurs exposent ce feuilleton politique et économique parfois violent avec tous ses ingrédients, comme les interventions des lobbies et des groupes de pression en coulisses ou l’importance des géants de la grande distribution, le tout sur fond de tension entre la globalisation et un retour en grâce des produits locaux depuis la fin des années 90.
Avec pédagogie, les chercheurs détaillent les nombreux labels de provenance qui se trouvent aujourd’hui sur les produits. Une mention particulière pour la très pratique carte des produits AOP (appellation d’origine protégée) et IGP (indication géographique protégée). Enfin, l’ouvrage propose un panorama chiffré de l’industrie agro-alimentaire helvétique. Au final, Manger suisse. Qui décide ? s’avère une lecture bien utile pour ajouter une dimension supplémentaire à la corvée des courses.
Débat au Salon du livre
Le 27 avril à 17h15, un débat public autour de cet ouvrage (et du thème qu'il traite) est organisé au Salon du livre de Genève (scène philo). Avec Jacques Bourgeois (conseiller national et directeur de l’Union suisse des paysans), Barbara Pfenniger (Fédération romande des consommateurs), Stéphane Boisseaux (chargé de cours à l’UNIL, coauteur de Manger suisse) et Rémi Schweizer (chercheur à l’EPFZ, coauteur de Manger suisse). L’animation est assurée par Annick Monod (journaliste).