Maître d'enseignement et de recherche à la Section d'histoire et esthétique du cinéma de l'UNIL, Charles-Antoine Courcoux analyse la masculinité des héros du cinéma hollywoodien dans un nouvel ouvrage paru chez Georg.
Collection Emprise de vue, Georg éditeur, 2017, 520p.
Dave Bowman contre le superordinateur HAL (2001, l’Odyssée de l’espace), Luke Skywalker contre Darth Vader (la saga Star Wars), Deckard contre les « répliquants » de la « Tyrell Corporation » (Blade Runner), John Connor contre les machines de Skynet (Terminator), Neo contre la Matrice (Matrix), Jake Sully contre un complexe militaro-industriel (Avatar) : depuis plus de quarante ans, le cinéma américain construit ses modèles de masculinité dominante au prisme d’un rapport antagoniste à la modernité technologique et à la rationalité scientifique. Or cet état de fait s’avère particulièrement paradoxal dans le cadre d’une institution aussi « technologique » que l’industrie hollywoodienne. Comment expliquer en effet la propension de ces films à déprécier l’un des fondements les plus nécessaires de l’industrie qui les produit ? N’est-il pas en outre surprenant que pareille opposition se fasse à une époque où l’Américain blanc n’a jamais disposé d’autant de richesses matérielles et de ressources techniques ? C’est à l’exploration de cette relation conflictuelle entre l’homme et la machine dans le cinéma américain contemporain que le présent essai est consacré.
Situé à la croisée des études filmiques et des études de genre (gender studies), Des machines et des hommes s’appuie sur une approche socio-historique du genre afin d’analyser la masculinité des héros du cinéma hollywoodien en tant que construction politique, narrative et esthétique. En examinant de façon critique des films emblématiques tels que Terminator, Rambo II, Gladiator, I, Robot, Alexandre, Le Prestige, Casino Royale ou 2012, l’auteur se propose de faire l’histoire de la masculinité américaine à l’ère postindustrielle et de montrer combien le cinéma états-unien forme alors un espace privilégié de restructuration imaginaire des masculinités dominantes dans leurs relations à la technologie.
En définitive, cette étude en appelle à envisager le sentiment d’aliénation qui accompagne l’essor des nouvelles technologies, des années 1970 à nos jours, comme un sentiment de dévirilisation.