Afin de garantir leur développement, les graines doivent obtenir des tissus maternels les nutriments nécessaires à leur croissance. L’équipe du Prof. Yves Poirier au Département de biologie moléculaire végétale de l’UNIL a identifié une protéine impliquée dans l’acquisition du phosphate par l’embryon chez la plante Arabette des dames. Les résultats de ses travaux, qui pourraient trouver des applications potentielles dans l’agriculture, sont à découvrir dans l’édition en ligne du 21 septembre 2017 de la revue «Current Biology».
Le phosphate est un nutriment essentiel à tous les organismes vivants. Ce composé est nécessaire, entres autres, pour la synthèse du matériel génétique, l’ADN. Le développement de l’embryon est totalement dépendant du transfert du phosphate des tissus maternels vers l’embryon. Malgré son importance, relativement peu de protéines impliquées dans ce transport sont connues à ce jour, que ce soit chez les mammifères - y compris l’homme - ou les plantes.
Garantir le transfert du phosphate du tissu maternel vers l’embryon
Le but des travaux menés par le Prof. Yves Poirier et sa doctorante Evangelia Vogiatzaki au Département de biologie moléculaire végétale de la Faculté de biologie et de médecine de l’UNIL consistait précisément à identifier comment les graines en développement obtiennent des tissus maternels les nutriments nécessaires à leur croissance. Pour ce faire, les biologistes ont utilisé la plante modèle Arabidopsis thaliana, l’Arabette des dames, et se sont appuyés sur plusieurs recherches déjà menées au sein du groupe. «Il y a une dizaine d’années, nous avons caractérisé la protéine PHO1 comme un transporteur de phosphate exprimé dans les racines; cette protéine est essentielle au transfert du phosphate des racines vers les feuilles. Les travaux qui font aujourd’hui l’objet d’une publication dans la revue Current Biology nous ont permis de démontrer que la protéine PHO1 est également présente dans une région précise de l’enveloppe de la graine entourant l’embryon, la chalaze», relate le Prof. Yves Poirier, directeur de l’étude.
Le tissu vasculaire maternel amenant les nutriments vers l’embryon se termine au niveau de la chalaze. En utilisant des techniques combinant la génétique, la biologie moléculaire et les greffes, l’équipe lausannoise est parvenue à démontrer que l’expression de la protéine PHO1 au niveau de la chalaze est importante pour le transfert du phosphate du tissu maternel vers l’embryon chez la plante.
Vers des applications potentielles en agriculture
Ces travaux ouvrent des perspectives intéressantes à plusieurs niveaux. «En agriculture, il pourrait être judicieux de pouvoir diminuer la teneur en phosphate de certaines graines, car le phosphate stocké sous forme de phytate limite l’absorption de microéléments essentiels, comme le zinc, par le système digestif», projette Evangelia Vogiatzaki, première auteure de l’étude publiée dans Current Biology. La protéine PHO1 a aussi un homologue chez l’humain, appelé XPR1. «Il serait ainsi intéressant d’examiner si PHO1/XPR1 joue un rôle dans le transfert du phosphate de la mère vers le fœtus via son expression dans le placenta», conclut la doctorante.