La génomique a ouvert des perspectives inédites pour percer l'origine des divers phénotypes tels que maladies ou traits physiologiques. Si un nombre important des résultats en génomique provient d'études statistiques qui mesurent les corrélations entre variations génétiques et phénotypiques au sein de grands groupes d'individus, celles-ci n'expliquent qu'une petite fraction de l'héritabilité. Pour pallier ce manque, Rico Rueedi, Zoltán Kutalik et le Prof. Sven Bergmann de l'UNIL proposent, dans le cadre de l'étude CoLaus, une nouvelle approche intégrant la métabolomique. A la clé, la perspective de biomarqueurs diagnostiques inédits.
Les résultats de ces travaux, réalisés au Département de génétique médicale (DGM) de l'UNIL et au SIB Institut suisse de bioinformatique, sont à découvrir dans l'édition du 20 février 2014 de la revue PLOS Genetics.
Bien que couronnées de succès avec plus de 12'000 corrélations détectées, les études GWAS (pour «Genome-Wide Association Study» ou étude d'association pangénomique) décèlent des effets génétiques généralement de faibles amplitudes. Ainsi, même combinés, ces effets n'expliquent qu'une petite fraction de l'héritabilité (proportion de la variation d'un phénotype dont la source est génétique) d'un phénotype. Un phénomène en partie dû à la complexité des phénotypes étudiés par les GWAS: le chemin biologique menant de la source génétique au phénotype clinique est long et difficile à rebrousser.
A mi-chemin entre gènes et phénotypes cliniques
L'étude menée par Rico Rueedi, post-doctorant au DGM et au SIB, Sven Bergmann, professeur associé au DGM et chef de groupe au SIB, ainsi que Zoltán Kutalik, actuellement professeur assistant à l'Institut universitaire de médecine sociale et préventive (IUMSP) du CHUV et chef de groupe au SIB, porte sur une classe de phénotypes plus simple: les concentrations de métabolites.
Ces phénotypes, dits métabotypes, sont situés à mi-chemin entre gènes et phénotypes cliniques. Ainsi, ils sont d'une part caractérisés par des effets génétiques plus prononcés et donc plus facilement détectables; d'autre part, ils constituent une source d'information sur la biologie sous-jacente à certaines corrélations entre variations génétiques et phénotypiques. «Dans notre étude, qui porte sur 1'000 individus participant à l'étude CoLaus (Cohorte Lausannoise), deux métabolites se présentent comme intermédiaires entre le gène FUT2 et la maladie de Crohn (une des maladies inflammatoires chroniques intestinales) pour l'un, et entre le gène SLC7A9 et l'insuffisance rénale chronique pour l'autre», détaille Rico Rueedi, premier auteur de l'article paru dans PLOS Genetics.
Vers de nouveaux biomarqueurs
Au-delà de leur caractère informatif, ces deux métabolites pourraient se révéler être des biomarqueurs pré-symptomatiques pour la maladie de Crohn ou l'insuffisance rénale chronique. «Ces métabolites permettraient alors de diagnostiquer ces maladies avant qu'elles ne se déclarent cliniquement et d'entreprendre une intervention thérapeutique préventive», conclut Rico Rueedi.