Deux équipes de chercheurs d'Oxford et de la Policlinique médicale universitaire de Lausanne ébranlent le dogme bien établi d'une forme de malaria dite «bénigne».
Aujourd'hui encore, la malaria menace 40% de la population mondiale, et prioritairement celle vivant dans les pays les plus pauvres. Chaque année, 500 millions de personnes sont touchées par cette maladie qui se révèle souvent fatale. Depuis 1902, date à laquelle Ronald Ross a reçu le Prix Nobel pour avoir démontré l'existence du parasite Plasmodium dans l'estomac de l'anophèle - le moustique transmetteur de la maladie - bien des progrès ont été réalisés pour lutter contre les épidémies de paludisme (le paludisme étant la terminologie francophone pour la malaria). Ces progrès ont notamment amené la communauté scientifique à considérer l'une des quatre espèces de ce parasite affectant l'homme (Plasmodium falciparum) comme de loin la plus dangereuse.
Les résultats de deux études publiées cette semaine dans PLoS Medicine viennent bouleverser ce dogme en démontrant que l'espèce Plasmodium vivax est elle aussi à l'origine de cas sévères pouvant entraîner la mort.
La première de ces études a été conduite par le Dr Ric Price d'Oxford sur les patients suivis entre janvier 2004 et décembre 2007 par un hôpital du Sud de la Papouasie (Indonésie). Elle a démontré qu'un patient sur quatre infecté par P. vivax a développé une malaria sévère alors qu'on comptait un patient sur cinq pour une infection par P. falciparum et un sur trois pour une infection mixte par ces deux parasites; dans la majorité des cas, les malades étaient des enfants de moins de cinq ans. La seconde étude a été dirigée par le Dr Blaise Genton, médecin responsable de la médecine des voyages à la Policlinique médicale universitaire de Lausanne et chercheur affilié à l'Institut tropical suisse (Bâle). Avec sa collègue Valérie D'Acremont, il a suivi durant huit ans les patients de deux dispensaires de Papouasie Nouvelle Guinée pour aboutir à un constat similaire : P. vivax semble être aussi dangereux que le parasite sur lequel les efforts majeurs de prévention et de soins se sont portés jusque-là.
«A une époque où la communauté internationale est prête à renforcer ses efforts pour mieux lutter contre la malaria, il est important, souligne le Dr Genton, de cibler efficacement les actions entreprises. Puissent les deux études publiées conjointement dans PLoS Medecine contribuer à mieux organiser cette bataille dont l'objectif est de sauver d'innombrables vies ... et notamment celles de jeunes enfants».